Marthe Akplogan est une jeune femme gabonaise exceptionnelle. Médecin, entrepreneure et active dans le monde associatif. J’ai eu le loisir de la voir intervenir aussi bien dans le monde associatif qu’en tant que médecin. J’ai tout de suite été touchée par sa douceur, son humilité et sa disponibilité. Bref, elle est si inspirante !!! Elle partage avec nous, son histoire de vie, sa passion pour la médecine, la création de sa marque de chaussures et son engagement associatif.

 On Dit Quoi ? : Marthe, peux-tu nous partager ton parcours ?

 Marthe Akplogan: Je suis née à Libreville, et j’ai grandi à Port-Gentil avec ma grand-mère paternelle (madré comme on l’appelait affectueusement). J’ai fait ma maternelle et mon primaire à Saint Roger. J’ai été au Collège et Lycée Raponda Walker, jusqu’en fin 4e. J’ai dû revenir sur Libreville chez mes parents, du fait du décès de madré. J’ai poursuivi ma scolarité à Immaculée Conception, où j’avais été envoyée par transfert, jusqu’à obtention de mon baccalauréat scientifique série D. J’ai ensuite entrepris mes études de médecine  à Owendo  pour devenir ce que je suis aujourd’hui un médecin généraliste.

On Dit Quoi ? : Qu’est-ce qui t’as inspiré à devenir médecin, et comment ta carrière médicale a-t-elle évolué au fil des années? Cela a-t-il été facile ?

 Marthe Akplogan: Je suis devenue médecin à cause de madré. Rien que de le dire cela me fait monter des larmes. Le premier leader qui a impacté ma vie c’est elle. Une femme Forte, déterminée, altruiste. Elle a impacté dans sa famille sur 2 générations. Et dans sa communauté. Mais elle était cardiopathe. Je l’ai bien remarqué par  sa façon de marcher avec des pauses pour respirer. Je lui ai dit un jour. « Je vais devenir médecin pour te soigner ton cœur ». C’est drôle car j’étais au CM2 je me disais que je pouvais après le CEP faire des études de médecine Elle m’a dit « lorsque tu seras médecin, je serai morte depuis longtemps » et moi je pensais tout le contraire. Elle était pour nous tous, immortelle. À aucun moment, nous nous sommes imaginés de vivre sans elle.

 Je suis rentrée en faculté, j’avais 17ans et j’étais pleine de doute. Je doutais de devenir médecin. Alors, je me suis inscrite en faculté de pharmacie. Ma mère était choquée. Elle m’a entretenue plus de 2h sur le sujet pour comprendre. Elle m’a dit à la fin : « madré sera en chaque patient ». Ce n’était pas facile la première année, le bizutage, le changement de niveau d’études, les cours. Mais, j’ai pu obtenir mon passage en 2e année (1ere des pharmaciens). Je n’en croyais pas mes oreilles. J’ai basculé en médecine l’année suivante car on a fait un tronc commun.

 En 2e année, on a eu une année super compliquée. Néanmoins, elle s’est encore soldée par une réussite. J’évoluais bien avec mon groupe de travail, certains collègues et aînés : Dr Kitaba, Dr Zélia, Dr Charlène, Dr Jessica, Dr Boris., Dr Mohamad, Dr juste, Dr Félix, Dr Christian Chassem, Dr Dorian, Dr Michael, Dr MICKA’A à qui je fais un coucou. Nous nous sommes beaucoup soutenus amicalement et intellectuellement. J’ai achevé cette étape en 2022 (9 ans au total). Ma période de recherche m’avait pris du temps avec la rédaction de ma thèse. Tellement éprouvante cette période.

 On Dit Quoi ? En dehors de ta carrière de médecin, tu as créé la marque Arondo, peux-tu nous en parler ? Quelle est sa particularité ? Qu’est-ce qui t’as poussé à créer cette marque ? Comment ton expertise médicale influence-t-elle ton approche de la conception de chaussures, notamment en termes de confort et de bien-être?

 Marthe Akplogan: Effectivement, j’ai créé ARONDO la Première marque de chaussures grandes pointures au Gabon. Mon premier bébé. ARONDO c’est le nom myènè de madré. Son vrai nom est MAROUNDOU MIGUINDOU Marie-Agathe. Elle avait un grand pied, du  43. J’ai toujours aimé faire des petits commerces, croquettes, toffee, crêpes pour m’acheter ce dont j’avais besoin. Rien de plus. Arrivée à l’internat, j’ai voulu faire plus. Bâtir une entreprise. Malheureusement, j’avais le syndrome de l’imposteur. Avec des vidéos de Lady Sonia, Marthe Carine, Dr CLAUDEL et surtout Valère Belias, un mentor car il était comme moi étudiant en médecine et entrepreneur. Je me suis lancée.

J’avais 24 ans et j’ai commencé avec les gaines amincissantes. Une dame sur Facebook vendait des gaines et je lui ai demandé comment faire pour acheter et revendre. Une femme exceptionnelle. Elle m’a coaché pour la page Facebook et les stratégies de vente et de communication. Je ne connaissais rien à ce niveau d’affaires. J’ai commencé avec 60 milles et j’avais tout vendu. J’ai acheté de nouveau et de nouveau tout vendu. Puis, Pascal Ango est arrivé avec une plateforme pour les entrepreneurs. J’ai adhéré et c’est là où je rencontre Sandra Tabongmo qui coachait les entrepreneurs à aller encore plus loin dans leur vision entrepreneurial.

Lors de notre entretien, je lui disais vouloir faire autre chose que les gaines. J’ambitionnais toucher au domaine de la chaussure comme j’ai moi-même un grand pied en tant que femme. Je chausse du 41. Elle m’a répondu : oui ça c’est bien. J’ai payé un coaching de 3 mois. Nous avons travaillé sur la page Facebook, la vision de l’entreprise, les perspectives. J’ai cherché les fournisseurs. J’ai donc pris mon capital, les bénéfices de mes ventes de gaines associés à mes économies. Cela m’a fait un peu  plus de 400 milles que j’ai investis dans les chaussures achetées au Sénégal. Là-bas,  les cordonniers sont nombreux et présents. Malheureusement, j’ai tout perdu à  cause de la douane. Soit dit en passant un vrai tueur d’affaires au Gabon !

 J’ai décidé de chercher au pays si il y’avait  même un cordonnier fabricant. Et j’ai alors découvert Mr Ludovic Gabao. Il a été un vrai Mentor avec sa structure Bottier. J’ai sous-traité avec elle et il m’a   transmis la passion de la chaussure. Je me suis formée avec lui et je fabrique désormais mes chaussures dans son atelier pour le moment. Le but est de créer des chaussures tendance et adaptées à la morphologie des pieds de tout un chacun. Grand oui. Si pied plat ou en varus mieux, avec des semelles adaptées. Je travaille pour toute cette mise en place

On Dit Quoi ? On t’ as vu très engagée pour la campagne STIMA de l’association Gabtrotter, qu’est-ce qui t’ as motivé ?

 Marthe Akplogan: Pascal Ango. Il m’a dit « Il serait intéressant de partager ton expérience en tant que jeune femme médecin, pour stimuler les jeunes filles » J’ai alors adhéré. J’ai participé à la caravane. C’était une belle aventure car j’aime partager, donner l’information. Pascal est vraiment un grand leader, il a su me transmettre l’envie de faire quelque chose pour ma communauté. Il m’a sortie de mon coin, et il m’a exposée. Lol

On Dit Quoi ? Comme si cela ne suffisait pas, tu as débuté ta propre activité associative à travers « Cœur santé ». Peux-tu nous en dire un peu plus ? Quels sont les défis auxquels tu as été confrontée et quelles réalisations te rendent particulièrement fière?

 Marthe Akplogan: «Cœur de santé » est encore une plateforme digitale d’information sanitaire, et d’éducation de la santé. Nous sommes en cours de devenir une vraie ONG. C’est un projet de fin 2020, qui a connu ces hauts et bas. En temps normal, c’était pour sensibiliser les filles sur les avortements. J’étais en 6e année de médecine. Le conseil ne suffisait pas, il me fallait plus pour informer au maximum. Je l’avais dit à un grand ami à moi William, et il m’avait proposé de créer un site internet ou une application. Là encore, je doutais car j’étais encore interne nouvellement affectée. Je ne me voyais pas le faire alors que les aînés, eux pouvaient le faire.

Nous avons tout de même débuté la création de l’application, malheureusement, elle n’a pas pu voir le jour. Nous avons tous essayé à maintes reprises  en 2021, sans succès. En janvier 2022, je me suis décidée à créer la page Facebook, mais je ne communiquais pas. J’étais thésarde, et j’hésitais, car j’avais trop de pression. En fin 2022, j’ai enfin commencé à communiquer. J’étais désormais Docteur en médecine. Je me suis engagée à mieux  sensibiliser la population devant les situations déplorables que nous rencontrons à l’hôpital. De fil en aiguille, les publications se sont multipliées. Dr Kitaba a rejoint l’aventure.

 Le bilan pour notre première année est satisfaisant. Nous avons fait une caravane sur les cancers féminins chez les jeunes lycéennes. Nous avons pu confirmer notre préoccupation : les jeunes filles ont des pratiques sexuelles à risque de cancer féminin. En plus de ne pas trouver utile le suivi gynécologique. Nous avons aussi créé notre calendrier menstruel pour soutenir les filles dans le calcul de leur zone rouge de fertilité. Il faut dire qu’elles conduisent à plus de 70% de grossesse précoce dans les lycées selon les chiffres. Sans compter les avortements clandestins et les grossesses multiples et rapprochées.

Il faut bien agir pour réduire ce fléau. Le quotidien n’est pas facile. Pour faire un bon travail, il faut des fonds. Nous fonctionnons sur fond propre et  sur quelques dons que nous recevons par nos interventions ou par des partenaires qui croient en nous, en notre impact majeur sur la population. Malgré tout, on tient. Le monde associatif n’est pas souvent facile, surtout lorsque l’on recherche de l’aide pour avancer. Même pour des actions gratuites, les portes sont fermées.

On Dit Quoi ? Comment parviens-tu à maintenir un équilibre entre ton rôle de médecin et tes autres engagements?

 Marthe Akplogan: Difficile. Surtout que nous ne sommes pas nombreux dans l’équipe. Ce que je peux dire c’est que cœur de santé est dans mon quotidien de médecin. Et, Arondo à mon temps libre.

On Dit Quoi ? Comment l’expérience médicale et la créativité dans la mode se combinent-elles dans ton travail associatif?

 Marthe Akplogan: Je suis médecin et entrepreneure. Mes activités me permettent d’avoir un esprit ouvert lorsque je discute avec les jeunes lors de nos passages. Pour STIMA, je répétais aux filles qu’elles doivent se réaliser. Elles ont forcément des compétences en dehors de leurs scolarités. Il faut les exploiter.

 On Dit Quoi ? Quels conseils donnerais-tu aux jeunes femmes qui aspirent à poursuivre plusieurs passions à la fois?

  Marthe Akplogan: Il faut se connaître soi-même, connaître ses limites, connaître ses capacités. Ne pas tout réaliser sinon après on ne réalise rien. Il faut aller progressivement, trouver le fil conducteur sans s’égarer. Il faut bâtir une équipe solide pour pouvoir facilement manager ces différentes entreprises.

On Dit Quoi ? Qui sont tes modèles féminins dans le domaine médical, de la mode et de l’humanitaire?

 Marthe Akplogan: En médecine, Dr Mouangue Gertrude, neurologue, ma tante. Elle est toujours au taquet intellectuellement. Elle me motive à faire plus. Le Dr Ntsame Stéphanie, dermatologue, également. Elle est une femme exceptionnelle. Elle est passionnée par son travail. J’ai le plaisir de la connaître. En mode, Ayite Maureen de Nanawax, elle avait aussi 24 ans à ses débuts. J’aime sa capacité à avoir gérer les petites choses pour bâtir de grandes. Et développer d’autres rivières financières. Elle maîtrise son art.J’aime aussi la promotrice de Edem shoes. J’aime ces créations, elle fait du bon travail depuis le Bénin. J’aimerais avoir une boutique aussi chic que la sienne.

 Dans l’humanitaire, Sephora Kodjo une perle de leader. Lorsque j’avais lu son histoire j’étais impressionnée. Si jeune et si déterminée pour sa communauté. Sa fondation Sephis aide les femmes à devenir des femmes d’impact. Et elle y met les ressources.

On Dit Quoi ? Quels sont tes projets à venir dans chacun de ces domaines d’activité? Comment envisages-tu de continuer à avoir un impact positif?

 Marthe Akplogan: Pour cœur de santé, nous allons poursuivre notre caravane dans les lycées sur 2024, avec des perspectives d’avenir dans les provinces. Nous allons distribuer le lien du calendrier à toutes les femmes du Gabon. Nous allons finaliser la création de l’ONG. Nous souhaitons créer des partenariats avec d’autres associations, les ministères concernés, les organismes internationaux. Nous désirons poursuivre d’autres programmes de prévention sur Libreville et à l’intérieur du pays. Bien entendu, nous aspirons à avoir notre QG pour nos différentes activités dans quelques années. En ce qui concerne Arondo, nous désirons former des bottiers, majoritairement des femmes. Ouvrir l’atelier et couvrir notre pays, puis exporter dans quelques années.

On Dit Quoi ? Quel message aimeriez-vous transmettre à nos lecteurs, en particulier aux jeunes femmes qui cherchent à explorer différentes facettes de leur vie professionnelle?

 Marthe Akplogan: Soyez libres de réaliser vos rêves. Ce n’est pas facile. Mais éloignez-vous du bruit, travaillez sur vous, sur vos projets. Ayez de vrais modèles de réussite dans vos domaines d’évolution, posez leur des questions. Ils ont déjà traversé vos difficultés. Formez-vous continuellement.

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Arondo https://www.facebook.com/profile.php?id=100063696007915&mibextid=2JQ9oc https://www.instagram.com/arondoshoes?igsh=MXhqbzgyeTI2emllZQ==

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